mardi 7 février 2012

Suicide d'une collègue de maths

Novembre 2011

Mention du drame dans le Journal Le monde : petit encart "fait divers" où il est mentionné qu'une professeur de maths s'est immolée par le feu dans son établissement mais qu'elle semblait - bien sûr- présenter des fragilités psychologiques et rencontrer quelques problèmes "dans son enseignement"...Comment créer un non-événement. Merci les Médias !!!

"L’acte désespéré de cette enseignante témoigne, par sa violence extrême, de la violence également extrême à laquelle sont aujourd’hui soumis la plupart des enseignants de notre pays. On aura beau jeu, bien sûr, de mettre en avant la “fragilité psychologique” de la personne, ses “problèmes personnels”, sa “dépression”, comme s’est empressé de le faire le ministre de l’éducation, peu prompt à assumer ses responsabilités devant la destruction de l’école publique (pour faire le jeu des officines privées…Business oblige) mise en oeuvre par son gouvernement. Car enfin, on ne naît pas dépressif, on le devient ! Ce débat hypocrite et malsain est de toute façon clos, le procureur en charge de l’affaire ayant qualifié l’acte de “tentative de suicide en lien avec l’activité professionnelle”. Il incombe à présent aux médias et aux politiques de lancer un grand débat sur la souffrance du monde enseignant, point aveugle de notre République et symptôme de sa déréliction tant sociale que morale. À l’heure où l’un des deux candidats à la primaire socialiste en a fait son thème privilégié de campagne, il faut enfin se questionner sur le rôle de l’école, devenue “bonne à tout faire” de notre pays : parfois lieu d’instruction mais aussi, et surtout, grande garderie sociale visant à contenir les débordements d’une jeunesse dépourvue d’espoir et livrée à la barbarie d’un modèle privilégiant le cynisme, l’individualisme et la méchanceté, au détriment de toute vertu morale (qui ne s'apprend pas, soit dit en passant, dans les manuels de morale mais par l'exemplarité du monde adulte). On nous dit que cette enseignante était perçue comme “trop sévère” par ses élèves. Peut-être avait-elle simplement conservé quelques exigences disciplinaires, contrairement à la démagogie que tout un discours pédagogiste nous invite à servir, préférant ainsi une pseudo-adaptation aux « réalités » d’un public massifié plutôt que son élévation. Le fait que cet évènement se soit produit dans un lycée et non dans un collège réputé difficile montre aussi les limites d’un système qui, après le collège unique, a ouvert le lycée à tous, sans aucune sélection – ou presque – à l’entrée, transformant le baccalauréat en “droit pour tous”. La République livre ainsi ses os à ronger, professeurs et diplômes, à une jeunesse laissée sans avenir et sans repères éducatifs. Le sacrifice extrême de cette femme, mais aussi celui de tous ces enseignants brisés par leur métier, mérite plus que de simples incantations et de belles promesses de campagne. Sans céder à l'angélisme, il faut rapidement se préoccuper de cette jeunesse que nous laissons derrière nous car c’est l’avenir de la civilisation, comprise comme antidote à la barbarie, dont il est ici question ”

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