mercredi 8 février 2012

Communiqué : Les professeurs s’adressent aux parents,aux élèves, à leurs collègues et à tous les citoyens :


L’école est menacée, les enfants et les jeunes sont en danger
- 6 février 2012 -


Depuis des années et des années, une campagne de dénigrement des enseignants et de l’École est menée à grande échelle sous de multiples formes. Insidieuse ou brutale, elle est alimentée par des gouvernants et des responsables de l’Éducation nationale successifs qui essaient de répandre l’idée que les professeurs seraient « absentéistes », « conservateurs », « corporatistes » et, d’une façon générale, hostiles à tout changement.
Cette avalanche ne vise qu’à couvrir une très grave dégradation de l’école qui met en danger l’avenir de la jeune génération, en particulier celle des milieux populaires. Sous couvert « d’autonomie des établissements », on organise la concurrence entre collèges et entre lycées que l’on voudrait assujettis à des principaux ou proviseurs transformés en « patrons d’entreprises ». Un projet de décret de novembre 2011 prévoit même la suppression de toute évaluation pédagogique indépendante des professeurs dont la compétence serait soumise à la seule appréciation d’un chef d’établissement ignorant tout du contenu de la plupart des disciplines, de la façon de les enseigner et, pour certains, n’ayant jamais fait classe de leur vie.
Parallèlement, la carte scolaire qui imposait un certain mélange des élèves d’origines sociales différentes dans les zones urbaines a été démantelée au nom de la « liberté de choix ». Le résultat est un véritable « sauve-qui-peut » hors des établissementsréputés difficiles où se retrouvent concentrés des jeunes des familles populaires avec des taux d’échecs parfois très élevés.
Dans le même temps, les jeunes professeurs sont jetés sans aucune formation pédagogique réelle devant ces classes, partageant souvent leur emploi du temps entre plusieurs établissements et changeant d’affectation chaque année. La perspective qui leur est ouverte, comme à tous leurs collègues, est celle d’un métier qui en dépit de l’augmentation des salaires des débutants est de plus en plus mal payé.
Enfin, des discours insistants préconisent une plus grande présence des enseignants dans les établissements, ceux qui les tiennent feignant d’ignorer qu’une heure de cours pour être efficace exige une préparation sérieuse et un suivi personnalisé afin de vérifier la solidité des acquis. Tout se passe comme si ces « responsables » se moquaient de la qualité du travail fait, des apprentissages réels des élèves et étaient prêts à transformer durablement l’École en simple garderie. L’École est une institution de la République : l’État ayant le devoir constitutionnel
d’assurer l’égalité des citoyens devant l’instruction, la politique éducative de la nation ne saurait être déléguée à l’initiative locale, les horaires, les programmes, le recrutement et l’évaluation des professeurs doivent être les mêmes sur tout le territoire.
On ne saurait reprocher aux enseignants de lutter pour le maintien de ces exigences. Ils veulent que le métier d’enseigner puisse être bien fait et que tous les élèves puissent apprendre dans les meilleures conditions, surtout ceux qui en ont le plus besoin. Soucieux de l’avenir des jeunes sur le plan personnel, civique et professionnel, ils ne se résignent ni à leur appauvrissement culturel ni à leur sortie de l’institution sans qualification ni diplôme.
Les professeurs doivent être écoutés et entendus car ce sont eux qui connaissent le mieux leur métier. Nos associations, membres de la Conférence des Présidents d’Associations de Professeurs Spécialistes, appellent les professeurs à témoigner de la réalité de ce qui se passe dans les établissements et s’engagent à faire connaître ces témoignages à tous. Elles invitent les parents, les élèves et les citoyens à prendre connaissance de la situation réelle de l’école. Aux uns et aux autres, elles proposent d’engager le nécessaire dialogue pour sauver la jeune génération enconstruisant une école qui permette à tous d’apprendre et de trouver une place digne dans la société.
Témoignez, écrivez nous, informez-vous.
Pour tout contact : Secrétaire Général Philippe Blanc



ANPBSE : Association Nationale des Professeurs de Biotechnologies Santé Environnement
APAP : Association des Professeurs d’Arts Plastiques
APEG : Association des Professeurs d’Economie Gestion
APEMU : Association des Professeurs d’Education Musicale
APMEP : Association des Professeurs de Mathématiques de l’Enseignement Public
APFLA-CPL: Association des Professeurs de Français et Langues Anciennes en Classes Préparatoires Littéraires
APHG : Association des Professeurs d’Histoire Géographie
APL : Association des Professeurs de Lettres
APPEP : Association des Professeurs de Philosophie de l’Enseignement Public
APSMS : Association des Professeurs de Sciences Médico-Sociales
APV : Association des Professeurs de Vente
APLV : Association des professeurs de langues vivantes
CNARELA : Coordination Nationale des Associations Régionales des Enseignants de Langues Anciennes
SLNL : Société des Langues Néo-Latines
UPBM : Union des Professeurs de Physiologie, Biochimie et Microbiologie

mardi 7 février 2012

Edito de M.Julliard dans Marianne-Janvier 2012

Nous qui ne lisons plus le Nouvel Obs depuis bien longtemps en raison de son démagogisme et de son goût très prononcé pour les innovations pédagogistes à la Meirieu avons beaucoup apprécié l'édito de M. Julliard dans Marianne qui a quelque chose d'un mea culpa...Merci M. Julliard !


Sarkozy contre les profs
Editorial de Jacques Julliard, Marianne 769, 14 janvier 2012

Le discours sur l’école de Nicolas Sarkozy au Futuroscope de Poitiers, le 5 janvier, est une excellente illustration du paradoxe actuel : un candidat non déclaré, Nicolas Sarkozy lui-même qui fait Une campagne électorale effrénée, au rythme de deux ou trois propositions par semaine ; un candidat déclaré, François Hollande, qui donne l’impression de rester en dedans de son action et de se réserver pour la suite.

Elle dira, la suite, quelle tactique était la bonne, mais il n’est pas trop tôt pour souligner que Nicolas Sarkozy, fidèle à lui-même, se livre jour après jour à un extraordinaire jeu de bonneteau, où il s’agit de saturer l’atmosphère par l’abondance dés propositions, de sauter de l’une à l’autre pour interdire toute discussion sérieuse, de jouer du paradoxe et de la contradiction avec le plus grand mépris pour les facultés mentales de l’électeur. Cet enfumage permanent ne doit pas masquer la réalité qui se cache derrière: ce qui est acceptable dans ces propositions n’est pas nouveau ; ce qui est nouveau n’est pas acceptable.

L’école, donc. On vous le dit : les profs ne sont pas assez présents dans les collèges et les lycées ! De la part d’un pouvoir qui a commis par ailleurs l’hérésie pédagogique là plus énorme du demi-siècle écoulé - la suppression des cours le samedi matin, et la réduction à quatre jours de la semaine pour l’école primaire - il faut tout de même un toupet phénoménal pour laisser entendre que c’est la faute des enseignants s’ils ne sont pas assez présents ! Car, on vous le dit encore, le métier d’enseignant doit changer : en dehors des heures de cours, le prof doit être à la disposition de ses élèves pour les recevoir, les conseiller, les orienter.

Mais, reconnaît avec bon sens le président, « il est insensé que, dans nos établissements, les enseignants ne disposent pas de bureau pour recevoir les élèves dont ils ont la responsabilité». Or, je ne sache pas que les constructions de collèges et de lycées nouveaux aient prévu cette innovation majeure. Les enseignants ne demanderaient pas mieux que d’avoir cet instrument de travail minimal. Imaginez une entreprise privée où l’on serait obligé de recevoir les clients dais les couloirs ou dans la rue. En attendant la construction des 100 000 ou 200 000 bureaux nécessaires, les profs continueront de voir leurs élèves au bistrot. Et la fameuse « présence » sera un pur argument électoral.

Autre exemple : la notation des professeurs. La substitution du chef d’établissement à l’inspecteur spécialisé, annoncée à grand son de trompe, est une étape majeure dans la dégradation des enseignants détenteurs d’un savoir en un corps d’assistantes sociales (sans le diplôme !) et de gentils organisateurs d’un grand Club Med auquel on conserverait hypocritement le nom d’Education nationale. Car, enfin, sur quels critères le chef d’établissement se fondera-t-il pour noter ses profs ? Le proviseur - supposons-le angliciste - assistera-t-il une ou deux fois par an aux cours du prof de physique ou de mathématiques ? Ou bien se fiera-t-il aux plaintes des parents, aux racontars des collègues, aux SMS des potaches ? Quelles que soient les insuffisances de l’inspection actuelle, la mutation proposée signifie clairement ceci : que le savoir est devenu une chose insignifiante, que tout ce que la société attend du « professeur », c’est son aptitude à encadrer les élèves, à éviter les « histoires » et les « embrouilles ».

C’est un travail de police de la jeunesse, au mieux d’animation, parce que la société a peur de ses adolescents et compte sur les enseignants pour les occuper, les distraire, en attendant qu’ils deviennent adultes. Merci pour le cadeau!

Conscient de l’énormité de ce qu’il propose, «je ne vois rien de choquant à ce que l’on confie au chef d’établissement cette évaluation », Nicolas Sarkozy ajoute immédiatement : « A condition que les compétences disciplinaires continuent à être évaluées par l’inspecteur »... C’est exactement la situation actuelle ! Qui croire ? Personne ! Que croire? Rien ! Mais, en attendant, le président aura occupé le terrain.

Alors, au bout du compte, que restera-t-il de ce discours ? L’idée que les profs sont des absentéistes, des fainéants, des individualistes et qu’il faut augmenter leur maxima de service ! C’est le discours convenu des vieux caleçons de la droite profonde, c’est le moment où le vieux-tonton-qui-a-réussi-dans-la-vie vous agrippe par le bouton de votre veste : «Je reconnais que vos profs font un travail utile et difficile. Mais avouez que ce sont de sacrés conservateurs ! Ils ne sont pas “modernes” ! »

Voilà ce qui se cache derrière le langage du président de la République : la sourde hostilité, remâchée depuis des décennies, de la France des nantis à l’encontre des enseignants. Le discours de la rentabilité et du maintien de l’ordre.

Alors il est nécessaire de rétablir la vérité, et l’opposition ne le fasse pas davantage. L’enseignement a toujours été un métier éreintant, devenu depuis peu un métier de chien. Demandez-vous pourquoi on ne trouve plus de candidats aux concours de recrutement, plus de jeunes disposés à jouir de cette sinécure : les 18 heures d’enseignement par semaine?

A la lourdeur des tâches professionnelles dans l’éducation s’ajoutent la pression consumériste des parents, la lâcheté des élèves, la démission de l’Etat. Je comprends mieux aujourd’hui ce que voulait dire Kant quand il affirmait que l’enseignement a deux ennemis : l’Etat et les parents d’élèves. Il faut défendre, sans esprit de recul, comme un des acquis de la civilisation et une garantie de la démocratie la liberté du professeur dans sa classe. Elle est un des derniers remparts contre la vulgarité de l’époque, contre la toute-puissance de l’argent, contre la marchandisation de la vie. Ne nous trompons pas de cible : ce n’est pas l’école qui est malade, c’est la société qui est pourrie. Pourrie par l’argent. Par la pub. Par le fantasme de la réussite matérielle. Par le conformisme.
Réformer l’école ? Oui, sans doute ! Mais d’abord la défendre !

Suicide d'une collègue de maths

Novembre 2011

Mention du drame dans le Journal Le monde : petit encart "fait divers" où il est mentionné qu'une professeur de maths s'est immolée par le feu dans son établissement mais qu'elle semblait - bien sûr- présenter des fragilités psychologiques et rencontrer quelques problèmes "dans son enseignement"...Comment créer un non-événement. Merci les Médias !!!

"L’acte désespéré de cette enseignante témoigne, par sa violence extrême, de la violence également extrême à laquelle sont aujourd’hui soumis la plupart des enseignants de notre pays. On aura beau jeu, bien sûr, de mettre en avant la “fragilité psychologique” de la personne, ses “problèmes personnels”, sa “dépression”, comme s’est empressé de le faire le ministre de l’éducation, peu prompt à assumer ses responsabilités devant la destruction de l’école publique (pour faire le jeu des officines privées…Business oblige) mise en oeuvre par son gouvernement. Car enfin, on ne naît pas dépressif, on le devient ! Ce débat hypocrite et malsain est de toute façon clos, le procureur en charge de l’affaire ayant qualifié l’acte de “tentative de suicide en lien avec l’activité professionnelle”. Il incombe à présent aux médias et aux politiques de lancer un grand débat sur la souffrance du monde enseignant, point aveugle de notre République et symptôme de sa déréliction tant sociale que morale. À l’heure où l’un des deux candidats à la primaire socialiste en a fait son thème privilégié de campagne, il faut enfin se questionner sur le rôle de l’école, devenue “bonne à tout faire” de notre pays : parfois lieu d’instruction mais aussi, et surtout, grande garderie sociale visant à contenir les débordements d’une jeunesse dépourvue d’espoir et livrée à la barbarie d’un modèle privilégiant le cynisme, l’individualisme et la méchanceté, au détriment de toute vertu morale (qui ne s'apprend pas, soit dit en passant, dans les manuels de morale mais par l'exemplarité du monde adulte). On nous dit que cette enseignante était perçue comme “trop sévère” par ses élèves. Peut-être avait-elle simplement conservé quelques exigences disciplinaires, contrairement à la démagogie que tout un discours pédagogiste nous invite à servir, préférant ainsi une pseudo-adaptation aux « réalités » d’un public massifié plutôt que son élévation. Le fait que cet évènement se soit produit dans un lycée et non dans un collège réputé difficile montre aussi les limites d’un système qui, après le collège unique, a ouvert le lycée à tous, sans aucune sélection – ou presque – à l’entrée, transformant le baccalauréat en “droit pour tous”. La République livre ainsi ses os à ronger, professeurs et diplômes, à une jeunesse laissée sans avenir et sans repères éducatifs. Le sacrifice extrême de cette femme, mais aussi celui de tous ces enseignants brisés par leur métier, mérite plus que de simples incantations et de belles promesses de campagne. Sans céder à l'angélisme, il faut rapidement se préoccuper de cette jeunesse que nous laissons derrière nous car c’est l’avenir de la civilisation, comprise comme antidote à la barbarie, dont il est ici question ”

Baccalauréat cuvée 2011

juillet 2011 - Nous publions ci-dessous un texte qui a attiré notre attention et qui nous a été envoyé par un professeur de philo désespéré par le niveau des copies qu'il corrige. Attention, si ce texte est sans aucun doute "non politiquement correct", il ne peut pour autant être tout simplement condamné sans prendre au sérieux les réalités qu'il met en avant (l'inculture des candidats en l'occurrence). On le critiquera au nom du fait qu'il "discrimine socialement des catégories d'élèves" alors qu'il met en avant l'échec patent de l'un des fondements de l'idéal républicain : l'instruction publique et disons-le en même temps, de la démocratie (car comment celle-ci peut-elle fonctionner sans l'éducation de ses membres ?). C'est un thème sérieux dont il faudrait que la gauche s'empare...au lieu de laisser une droite peu scrupuleuse l'utiliser, en faire ses choux gras et ses slogans de campagne tout en accélérant la coulée du Titanic public aussitôt aux commandes...


"Comment supporter, cette année encore, d’entendre nos gouvernants et nos spécialistes en science de l’éducation se gargariser des nouveaux records de réussite au baccalauréat ? Comment pourrait-il en être autrement quand tout est fait pour que de tels taux, dignes de Républiques bananières soient atteints ? Cette année, on a confié le bac technique aux jeunes profs, m'a-t-on dit, car ils sont plus "cool"...En sur-notant les candidats, comme on nous y invite, nous collaborons bon gré mal gré à la grande entreprise de mystification qu’est devenue la distribution de cet examen. Dans les pays voisins, nul n’a cédé à une telle démagogie : en Suisse, comme en Allemagne, le lycée demeure un privilège des élèves véritablement capables et désireux de poursuivre des études supérieures (environ 30 à 40%), ce qu’accompagne, bien sûr, une véritable politique de promotion et de valorisation des études professionnelles, tant injustement dénigrées en France. En Allemagne, nul n'a besoin d'un "bac" (Abitur) pour réussir dans la vie et faire carrière: l'ascenseur social fonctionne encore un peu et ceux qui ont du mérite peuvent encore tirer leur épingle du jeu. En France, ce n'est plus le cas : la reproduction sociale a atteint des records eux aussi inédits ainsi que le taux de chômage des jeunes. Alors que fait-on ? On donne le bac à tout le monde en espérant ainsi acheter la paix sociale et s'exonérer de toute politique éducative professionnalisante sérieuse (qui coûte soit dit en passant plus chère que des études générales ne nécessitant aucun investissement en matériel).
Peu importe si la déroute de cette entreprise (90% des jeunes Français au Bac) est de plus en plus difficile à cacher : dans la France de nos idéologues, une réalité que l’on tait n’existe pas et « mettre le couvercle » sur les choses qui fâchent, véritable sport national, nous aidera sans doute à partager le constat de nos spécialistes : « le niveau monte »…

Bref, me voici, prof de philo, corrigeant des classes STI et STL (industrie et laboratoire) : 121 copies, 10 jours de correction parsemés de réunions. L’exercice n’est pas aisé mais le nombre de copies à corriger en un temps record n’est pas le principal problème. Celui-ci se résume, pour l’essentiel, à la question suivante : comment noter le Néant ? Comment noter l’indigent, l’inexistant, le rien ? Toutes les notes inférieures à 5 devront faire l’objet d’une deuxième correction, le 0 est tacitement proscrit car il exige un rapport… L'inspecteur nous a demandé de valoriser tout ce qui était "valorisable" (nous saurons gré par exemple aux candidats d'avoir passé un peu de temps sur leur copie, d'avoir usé un peu leurs stylos...)Dans l'éduc nat des Bisounours, tout le monde est gentil, tout le monde doit être récompensé pour ses menus efforts... Chaque copie est pourtant pour moi une douleur morale (l'épreuve du bac n'est plus une épreuve si ce n'est pour le correcteur...)

Comme on voudra faire croire aux intéressés qu’ils sont exactement comme les autres (impératif catégorique d'égalité démocratique), les élèves du technique auront à faire face à des sujets classiques de philosophie, c’est-à-dire au choix entre deux sujets de dissertations et une explication de texte, "on ne peut plus traditionnels" (à se demander si ceux qui les conçoivent savent à qui ils s'adressent...). Le premier sujet (« l’art est-il un moyen d’accéder à la vérité ? ») a été, sans surprise, très peu choisi, les candidats à ce bac n’ayant en général malheureusement pas une culture artistique et un capital culturel leur permettant de remplir le minimum syndical des 2 pages (avec saut de ligne) qu’ils se donnent généralement comme objectif. Bref, je n’y apprendrai pas grand-chose à part, quand j’aurai de la chance, que « l’art, de toute façon, ne sert à rien"(ce qui ne serait pas si mal si on pouvait accorder une quelconque valeur à l'inutilité)ou, pour les plus spécialistes que "Picasso est un peintre réaliste et cubiste". Les références ne sont pas le problème majeur : celui -ci réside plutôt dans l'incapacité des candidats à aligner deux ou trois phrases entretenant entre elles un quelconque lien logique.

Arrive le deuxième sujet qui est un véritable objet de torture moral quand je pense aux élections à venir et à l'idéal démocratique : « Est-ce la loi qui définit ce qui est juste ? » J’y apprends, là, par contre beaucoup de choses sur le niveau de culture institutionnel des candidats :

Extraits : « Les règles, les lois furent instaurer en 1849 dans une charte : La déclaration des droits de l’homme et du citoyen » ; « En France, tous les citoyens sont soumis aux mêmes règles écritent dans la déclaration officielle des droits de l’homme et du citoyens » (référence indépassable, la DDHC est le seul exemple de « loi » que les candidats sont capables de citer); « Plus le temps passe et plus il y a de lois car la population augmente et le gouvernement cherche à l’ordonner au maximum. Mais on peut facilement se douter que parmis cette montagne de lois, certaines d’entre elles sont mal conçues et présentent des erreurs. » (introduction) ; « Grâce à la loi un homme est égal et libre » ; « Quand on parle de la loi, on parle généralement des lois décidées et approuvées par le gouvernement ou le gérant d’un pays »; « juste est la racine du mot justice qui provient du champ lexical de loi » ; « la loi est une chose qui a été créé par l’homme » (tentatives de définition) ; « la loi est faite pour tout un pays pareil ; elle nous met dans le même sac considérant que se soit bien pour une majorité » ; « la loi est juste si celui qui la décrète le veux, du moins si il est extrêmement difficile d’établir un texte qui fixera des droits véritablement égaux à tous ou encore réservés à des catégories désavantagées » ; « les lois sont propres à chaque pays et sont décidé par le gouvernement » ; « il y a plusieurs sortes de lois, elles peuvent être données par un pays, par un foyer par un travail, par une entreprise…Nous ne sommes donc pas tous concernés par les mêmes lois. Mais au quotidient, on est tous litéralement entourés de lois »…

Concernant le sujet 3 portant sur un texte de Bergson relatif à la liberté, je ne serai pas mieux servie…Une candidate m’expliquera par le menu que la liberté, c’est avoir le choix entre un restaurant mexicain ou un restaurant asiatique mais que de toute façon, aucun n’est un bon choix car elle a des kg en trop. Un autre candidat m’expliquera qu’en France, on n’est pas libre car on n’a pas le droit de voler dans les magasins…Le reste est à l’avenant…

On lit à longueur de colonnes de journaux que le métier des profs a changé, qu’il leur faut intégrer leur nouvelle mission : éduquer. Nous n’avons plus pour seul rôle d’instruire ; il nous faut éduquer, divertir, récompenser les gentils « apprenants » …N’est-ce pas là un gâchis total d’argent public ? Former des certifiés et des agrégés hautement compétents dans leurs matières pour qu’ils finissent en «travailleurs sociaux », en instituteurs de jeunes adultes récalcitrants le plus souvent à tout apprentissage . Pour ma part, je ne rêve plus que d’une chose : quitter le navire qui coule, partir vers d’autres horizons où la qualification ne serait pas une chose dont on devrait avoir honte, aller vers des pays où le métier d’enseignant peut encore s’exercer dignement…Comptera-t-on les enseignants dans les statistiques de la « fuite des cerveaux » ou la comptera-t-on pour rien, au rang des pertes et profits de la République ?!"