lundi 24 novembre 2008

Collectif républicain d'enseignants néo-titulaires

samedi 8 novembre 2008

extrait du blog :

http://pouruneecolerepublicaine.blogspot.com


Déclaration d'intention d'un collectif d'enseignants néo-titulaires

Enseignants titularisés en 2008, nous venons d’apprendre que nous allions bientôt faire l’objet de la gracieuse générosité de notre ministre. Ce dernier en effet a annoncé en septembre qu’il octroierait, cette année, une prime de 1500 euros à chaque professeur titularisé en juillet dernier.
Pourquoi cette somme ? Pourquoi nous ? Pourquoi seulement nous ? Et non pas, par exemple, nos collègues qui enseignent depuis un an ou deux ? Ne connaissent-ils pas un équilibre financier aussi précaire que le nôtre ? Pourquoi cette prime donc, alors que personne ne l’a sollicitée, alors que les revendications des enseignants portent aujourd’hui sur des questions autrement plus importantes, des questions qui ont à voir avec la survie même de l’école républicaine ?Mystère impénétrable et fascinant de l’arbitraire de ceux qui nous gouvernent! Récompenses et châtiments alternent selon leur caprice ou les objectifs de leurs petites manigances.

En la circonstance, puisque c’est d’une gratification dont nous faisons l’objet, nous aurions dû nous réjouir, voire clamer notre gratitude envers le bienfaiteur. Mais reste un problème. Et M Darcos le reconnait lui-même (cf. Le Canard enchaîné 23/10) : toutes les mesures qu’il annonce depuis quelques mois ont pour finalité première de « masquer » ce qui se joue aujourd’hui à l’école. Cette prime, comme les autres “mesurettes” (introduction de médailles au baccalauréat, retour des cours de morale, etc..) vise à faire diversion, à cacher l’entreprise de démolition. D’ailleurs, même si le ministre le contestait, en arguant la main sur le coeur que par cette mesure il n’entend qu’œuvrer à ”l’amélioration de la condition enseignante”, il devrait encore reconnaître qu’il y a loin entre l’octroi conjoncturel d’un petit pécule, et la mise en place d’une vraie politique salariale globale. L’ironie en la circonstance étant que rien n’assure que cette prime sera reconduite, ne serait-ce que l’an prochain! Il faudrait donc faire preuve d’un aveuglement bien singulier pour ne pas voir que nous avons affaire là à une manœuvre dont le but est de dissimuler la réalité du désengagement historique de la puissance publique vis-à-vis de l’Ecole.

Voilà pourquoi, en tant que jeunes enseignants (sachant les classes surchargées, sachant combien nos collègues, d’année en année, se voient privés des moyens d’instruire correctement leurs élèves), nous ne pouvons recevoir béatement cette gratification, sans avoir le sentiment de nous faire un peu complices des basses manœuvres du cabinet Darcos. Et c’est pourquoi aussi un certain nombre d’entre nous a décidé de reverser tout ou partie de cette somme, en la mettant à disposition des chefs d’établissements et des équipes pédagogiques nouvellement déshérités qui exprimeraient, via notre site internet, des demandes précises concernant des besoins matériels nécessaires à l’instruction des élèves.

Leçon de littérature

" Que peut-il ? Tout. Qu'a-t-il fait ? Rien.
Avec cette pleine puissance, en huit mois un homme de génie eût changé la face de la France, de l'Europe peut-être. Seulement voilà, il a pris la France et n'en sait rien faire. Dieu sait pourtant que le Président se démène : il fait rage, il touche à tout, il court après les projets ; ne pouvant créer, il décrète ; il cherche à donner le change sur sa nullité ; c'est le mouvement perpétuel ; mais, hélas ! cette roue tourne à vide.
L'homme qui, après sa prise du pouvoir a épousé une princesse étrangère est un carriériste avantageux. Il aime la gloriole, les paillettes, les grands mots, ce qui sonne, ce qui brille, toutes les verroteries du pouvoir. Il a pour lui l'argent, l'agio, la banque, la Bourse, le coffre-fort. Il a des caprices, il faut qu'il les satisfasse. Quand on mesure l'homme et qu'on le trouve si petit et qu'ensuite on mesure le succès et qu'on le trouve énorme, il est impossible que l'esprit n'éprouve pas quelque surprise. On y ajoutera le cynisme car, la France, il la foule aux pieds, lui rit au nez, la brave, la nie, l'insulte et la bafoue ! Triste spectacle que celui du galop, à travers l'absurde, d'un homme médiocre échappé ".
Victor HUGO, dans " Napoléon, le petit " Réédité chez Actes Sud.

EN LISANT CE TEXTE, VOUS PENSIEZ A QUI ? ...

vendredi 30 mai 2008

Faire mieux et plus avec moins : l'équation impossible !


Article du Monde, 29 mai 2008


Une catastrophe est en marche, plus grave que les nouveaux programmes de l'école primaire ou les suppressions de postes qu'on dénonce dans la presse ou dans la rue. Il sera facile, en effet, de revenir sur ces mesures.
La suppression de deux heures de classe dans l'enseignement primaire et la semaine de quatre jours risquent au contraire d'être irréversibles. Et personne ne dit rien ou presque. Le forfait s'accomplit dans l'indifférence générale. Munich s'était accompagné d'un "lâche soulagement". Ce lâche consentement, lui aussi, annonce une débâcle.
Les comparaisons internationales nous montrent en mauvaise position et 10 % à 15 % des élèves qui entrent en 6e sont incapables de suivre. Et qu'est-ce qu'on fait ? On réduit la durée de l'enseignement ! A qui fera-t-on croire qu'il est possible d'apprendre mieux et plus en travaillant moins ? Même le ministre n'a pas osé dire du bien de cette mesure que lui a imposée - dit-on - un président qui n'a décidément pas besoin de réfléchir pour décider.
M. Darcos s'est borné à dire que nous restions "bien au-dessus de la moyenne des pays qui obtiennent les meilleures performances". Mais s'ils réussissent, c'est parce qu'ils répartissent les heures de classe dans toute la semaine. Vingt-quatre heures sur six jours sont beaucoup plus efficaces que sur quatre : tout le monde le sait. Du professeur Debré au docteur Hubert Montagner, les médecins ont répété que six heures de classe pour des enfants de moins de 8 ans, c'est trop pour être efficace.
Avec trente-six semaines de quatre jours, l'Ascension, le lundi de Pentecôte, le 1er et le 8 mai, le 11 novembre, cela fera moins de 140 jours de classe par an. Il y en a 210 au Japon, 200 en Italie et au Danemark, 188 en Finlande, 190 en Grande-Bretagne. Et l'on se plaint du niveau des petits Français ? Il n'y a qu'une chose vraiment importante en éducation : c'est le travail des élèves. Sur quel miracle, sur quelle potion magique, M. Darcos compte-t-il pour compenser les amputations qu'il décrète ?
Tout le monde le sait, mais personne ne dit rien. Où sont les défenseurs du niveau, si prompts à dénoncer toute innovation pédagogique ? La vague promesse d'un retour aux bonnes vieilles méthodes les rassure : elles ont fait leurs preuves, disent-ils. Mais à raison de trente heures par semaine, sans compter les heures supplémentaires prodiguées à la veille du certificat d'études. Croient-ils par hasard qu'elles seront aussi efficaces à raison de vingt-quatre heures ?
Avec un cinquième de temps en moins, il leur faudrait un an de plus. Et qu'on ne nous raconte pas qu'on va se concentrer sur les "fondamentaux", alors qu'on ajoute encore des matières. Et les parents d'élèves ? Ce sont les premiers intéressés. Trop contents de disposer du samedi matin, ils se sont bornés à des protestations de principe. Mais on pouvait leur donner cette matinée en prenant celle du mercredi ; un tribunal administratif vient de statuer que c'était compatible avec le catéchisme.
On pouvait aussi généraliser ce qui avait été accepté dans les départements qui avaient adopté la semaine de quatre jours : raccourcir un peu les vacances. Pas du tout : on supprime ces journées supplémentaires. Les princes qui nous gouvernent ne sont pas mesquins... La preuve ? Cette mesure ne rapporte rien au budget ; c'est pur cadeau.
Et les enseignants ? Rendons-leur cette justice : ils n'ont rien demandé. Les institutrices sont les premières inquiètes. Elles qui font travailler les élèves - car la classe n'est pas un cours -, elles mesurent mieux que quiconque l'impossibilité de faire plus avec moins et elles savent qu'on les rendra responsables, demain, des échecs de l'école. Mais comment refuser un cadeau pareil ? Et pourtant, cette mesure compromet, plus que bien d'autres qui provoquent des grèves, l'enseignement de haut niveau et la qualité du service public que les syndicats prétendent défendre.
Le résultat de ces lâchetés et de ces hypocrisies est connu d'avance : le nombre des élèves incapables de suivre en 6e va augmenter. Je dénie à quiconque ne proteste pas aujourd'hui de toutes ses forces contre cette mesure le droit d'ouvrir demain la bouche pour déplorer cet échec majeur.
Ceux qui se prétendent démocrates et défenseurs du service public et ne dénoncent pas aujourd'hui cette entreprise de déconstruction sont des menteurs. Les parents informés des classes moyennes et supérieures sauront compenser, par des recours divers et payants, mais fiscalement avantageux, les insuffisances organisées de l'école publique. Les milieux populaires, eux, feront les frais de cette amputation.
Il ne faut pas se payer de mots. J'attends qu'on m'explique comment des programmes plus copieux contribuent au resserrement sur les fondamentaux, et comment on apprend plus et mieux en travaillant moins.
Antoine Prost est historien de l'éducation.

lundi 26 mai 2008

Analyse : tout est dit





La leçon des néo-libéraux : comment ruiner l'école publique?



Par Marie Perret
Samedi 3 mai 2008





Quatre constats inquiétants

1. Plus de 150 000 élèves sortent chaque année du système scolaire sans diplôme.

2. Le recours à des officines de soutien privé est de plus en plus systématique. Il faut savoir qu’Acadomia, entreprise spécialisée dans les cours à domicile, est désormais cotée en bourse. Il y a, de fait, une privatisation rampante de l’enseignement.

3. L’école, depuis 30 ans, ne joue plus son rôle d’« ascenseur social ». Un exemple : il n’y a jamais eu aussi peu d’enfants d’ouvriers dans des grandes écoles comme Polytechnique ou Centrale qu’aujourd’hui.

4. Le niveau baisse. Il y a quelques années encore, il était de bon ton de railler les professeurs élitistes et grincheux, toujours prompts à « seriner l’antienne du niveau qui baisse ». Aujourd’hui, le constat est pour ainsi dire unanime. On tire la sonnette d’alarme à tous les niveaux, et dans toutes les matières. Instituteurs, professeurs de collège et de lycée, mais également professeurs d’université : tous déplorent le peu de culture des élèves et des étudiants,leur manque de repères historiques, leur difficulté à maîtriser la langue française, à organiser leur pensée de façon rigoureuse, à exprimer leurs idées de façon fine. Les raisons de ces difficultés ne sont pas seulement exogènes et sociologiques.
Si le niveau baisse, ce n’est pas seulement à cause de l’hégémonie de la société du spectacle ou de l’attitude « consommatrice » des jeunes : c’est aussi parce que l’école est de moins en moins exigeante. Bien sûr, le régime n’est pas le même partout : dans les grands lycées de centre ville, où sont généralement scolarisés les enfants de la bourgeoisie, les exigences sont restées à peu près les mêmes.
Dans les quartiers populaires, en revanche, les professeurs, débordés, gèrent tant bien que mal la violence liée à l’indiscipline en occupant les élèves, à défaut de les instruire. Les parents cherchent par tous les moyens à dé-sectoriser leurs enfants ou à les inscrire, quand ils sont assez riches, dans le privé.
Le contraste entre les établissements est désormais tellement marqué qu’il n’est pas excessif de parler d’une « école à deux vitesses ».
Ces quatre faits ne sont évidemment pas indépendants les uns des autres.
Le quatrième constat, qui est le plus déterminant, éclaire les trois autres : c’est parce que le niveau baisse que les familles bourgeoises enrichissent les officines de soutien privé tandis que les enfants des milieux populaires vont grossir les rangs de ceux qui sortent du système scolaire sans diplôme. On ne s’étonnera donc pas que l’école joue aujourd’hui moins que jamais son rôle d’« ascenseur social ».

A qui profite le crime ?

La question qu’il faut poser est la suivante : qui a intérêt à ruiner l’école publique ? A qui profite le crime ?
En 1996, le centre de développement de l’OCDE a publié un intéressant rapport. Le titre est sibyllin (« La faisabilité politique de l’ajustement »), le style, technocratique, l’enjeu effrayant : sous couvert d’apprendre aux gouvernements comment réduire les déficits budgétaires, son auteur, Christian Morrisson, montre comment libéraliser tous les secteurs des activités humaines en « réduisant les risques » – entendez : en évitant la révolte sociale. Soit le problème suivant : étant donné qu’il n’y a pas de libéralisation possible sans destruction des services publics, étant donné que les peuples sont généralement attachés aux services publics, trouver le moyen de supprimer les services publics tout en évitant de mettre les gens dans la rue. La solution est simple, mais il fallait l’inventer : Christian Morrisson préconise la méthode douce qui consiste à diminuer la qualité des services publics. Dans l’extrait ci-dessous, l’auteur prend l’exemple de l’école. Goûtons ce morceau d’anthologie du cynisme néo-libéral :

« Les mesures de stabilisations peu dangereuses : Si l’on diminue les dépenses de fonctionnement, il faut veiller à ne pas diminuer la quantité de service, quitte à ce que la qualité baisse. On peut réduire, par exemple, les crédits de fonctionnement aux écoles ou aux universités, mais il serait dangereux de restreindre le nombre d’élèves ou d’étudiants. Les familles réagiront violemment à un refus d’inscription de leurs enfants, mais non à une baisse graduelle de la qualité de l’enseignement et l’école peut progressivement et ponctuellement obtenir une contribution des familles, ou supprimer telle activité. Cela se fait au coup par coup, dans une école mais non dans l’établissement voisin, de telle sorte que l’on évite un mécontentement général de la population. »

Il n’y a qu’à diminuer progressivement la qualité de l’enseignement : les citoyens n’y verront que du feu. Personne ne descendra dans la rue, les gouvernants ne seront pas inquiétés, le secteur privé tirera tout le bénéfice, car les familles fuiront les établissements publics. Tout ira pour le mieux dans le meilleur des mondes possibles.

Christian Morrisson décrit sans fard la réalité de l’école publique. La qualité de l’enseignement, depuis 30 ans, baisse à un point tel que les citoyens n’ont plus confiance dans leur école.
Résultat : la marchandisation de l’enseignement est en marche (après celle de l’eau, après celle des énergies, après celle de la santé, etc.). L’école publique se délite progressivement. On grogne bien ici ou là, on réclame davantage de moyens, mais force est de constater que la recette Morrisson marche bien : le « risque politique » que constitue le « mécontentement général de la population » est évité.
Les « idiots utiles »
Pour résister à cette entreprise de destruction de l’école publique, il aurait fallu défendre l’idéal
d’une institution forte, dévolue à la transmission de savoirs exigeants, sourde aux pressions venant de la société civile. Pour combattre efficacement Morrisson, il aurait fallu se ranger derrière Condorcet. On aurait pu croire que la gauche, fidèle aux principes de l’école républicaine, allait résister à l’offensive. Non seulement elle ne l’a pas fait, mais elle a apporté, à son corps défendant, un soutien inespéré au programme de la marchandisation de l’école. Le discours « pédagogiste » auquel une grande partie de la gauche a adhéré a eu pour principal effet de précipiter l’affaiblissement de l’institution scolaire ainsi que la baisse général du niveau. Voici quelques exemples de mesures qui ont participé à cette baisse :

• En valorisant des qualités qui n’ont rien à voir avec les compétences qu’on doit attendre d’un professeur, on a recruté des enseignants qui n’étaient pas toujours qualifiés. On a oublié qu’avant d’être « gentil », « dynamique », d’« aimer les élèves », de « participer activement au projet d’établissement », un professeur doit se distinguer par la maîtrise des savoirs qu’il transmet.

• En instaurant le passage automatique, on a fait en sorte que tous les élèves, même ceux qui n’ont pas le niveau, puissent passer dans la classe supérieure. Comme le redoublement est un luxe (les gestionnaires de l’éducation nationale savent que cela coûte de l’argent), on a poussé les professeurs au laxisme. Pire : on leur a retiré le droit de s’opposer au passage de tel ou tel élève dans les conseils de classe. Les parents sont généralement contents : ils pensent qu’on fait un cadeau à leurs enfants. Ils se trompent : en fait de cadeau, il ne s’agit que de faire des économies.

• Sous le prétexte idiot que la discipline ferait violence aux élèves, qu’un cours doit être « vivant», que le cours magistral est « ringard », on a laissé le désordre s’installer dans les classes. Les professeurs constatent amèrement qu’il est de plus en plus difficile de faire la classe dans de bonnes conditions et d’instruire les élèves.

• En bradant les diplômes qui, de fait, ont de moins en moins de valeur sur le marché du travail, on a poussé tout le monde à faire des études longues. Comme les conditions d’enseignement à l’Université sont souvent difficiles et parfois déplorables, comme les BTS et les IUT sont pleins, les parents qui ont de l’argent inscrivent leurs enfants dans des écoles supérieures privées (qui coûtent très cher). Ceux dont les parents n’ont pas les moyens se retrouvent sur le marché du travail : ils constituent alors une main d’oeuvre paupérisée, qui est d’autant plus exploitable par le patronat qu’elle est peu qualifiée.

• On a délaissé l’enseignement technique et professionnel, éternel parent pauvre de l’éducation nationale, alors qu’il peut assurer une solide formation à des élèves qui s’ennuient dans les filières générales.

• Au nom des meilleurs sentiments du monde, on a remis en question le principe d’égalité républicaine et condamné les élèves des quartiers populaires : au lieu d’exiger d’eux ce qu’on exige dans les collèges et les lycées parisiens, on a "adapté" l’enseignement (« inutile de leur faire lire Racine, Descartes ou Montaigne : c’est trop compliqué pour eux et puis c’est tellement éloigné de leurs préoccupations »). On enseigne les humanités aux fils et aux filles de la bourgeoisie, tandis qu’on expérimente, sur les enfants des quartiers populaires, les nouvelles "pédagogies".

Les moyens de résister

Comment résister à cette entreprise d’affaiblissement de l’école publique ?

Voici, pour conclure, quelques pistes :

• En renforçant l’institution scolaire : il faut instaurer de la discipline, élever le niveau des exigences, instruire les élèves (et non les occuper ou les amuser).

• En recrutant des professeurs compétents : il faut que ceux-ci soient recrutés sur concours nationaux, pour leurs savoirs ainsi que leur capacité à les transmettre le plus clairement et le plus rigoureusement possible.

• En concentrant les moyens dans les établissements des quartiers populaires : les professeurs les plus puissants, les mieux formés, les plus savants doivent être envoyés dans ces quartiers et exiger des élèves ce qu’ils exigeraient des élèves d’un lycée comme Henri IV.

• En cessant d’abaisser l’enseignement technique et professionnel : il faut que les élèves puissent en tirer une formation solide grâce à laquelle ils pourront trouver du travail, mais aussi suffisamment généraliste pour qu’ils puissent changer d’entreprise.

vendredi 23 mai 2008

Le service mini môme


Alors que les manifs contre les suppressions de postes dans la fonction publique sont de plus en plus importantes, Le roi Sarko tente une diversion en lançant le service mini môme.

Proverbe Sarkozien:
Quand je montre la grève, l'idiot regarde le service minimum !!!

Mais oui, que faire des enfants scolarisés en primaire et maternelle (en collège et lycée, un accueil des élèves est obligatoire) lorsque les parents bossent et que ces fainéants de profs font encore grève alors que le ministère ne négocie toujours pas avec les partenaires sociaux (ça fait pas partie de leur boulot ça ???) ?
Alors, pour ne pas pénaliser les gens qui veulent travailler plus pour gagner plus, le roi Sarko sort la carte du service minimum.

Mais, il me semble que ce même roi Sarko demande l'ouverture des magasins le dimanche.Que va-t-on faire des enfants des personnes qui vont bosser le dimanche ? Va-t-on imposer un service mini môme aux crèches et centres aérés ? A moins que l'on impose aux profs qui font grève en semaine de s'occuper des enfants des travailleurs du dimanche...




Mais non, la solution est tout autre. Le dimanche , il y a la messe !...Voila pourquoi le roi Sarko entretient de si bons rapports avec les représentants de dieu...c'est afin de pouvoir négocier avec eux qu'ils s'occupent des enfants des travailleurs du dimanche...Ils mettront à profit tout ce temps pour enseigner aux élèves ce que les professeurs ne peuvent leur transmettre (pour incompétence), soit, les différences entre le bien et le mal, le sens à la vie,...
Ils en feront des bons petits citoyens, qui, lorsqu'ils seront grands, préfèreront le fatalisme et la loi de dieu à la revendication et la lutte pour défendre leurs droits...

mardi 20 mai 2008

Incongru


Un prof de maths se rend comme chaque mardi matin dans la salle de cours qui lui a été assignée... Quelle surprise quand il se retrouve dans un bâtiment à moitié effondré, sa salle de classe vidée de ses chaises et de ses tables et en voie de "réhabilitation". On avait tout simplement oublié de lui dire que la bâtiment dans lequel il travaille serait en travaux. Il cherchera désespérément une salle disponible pendant son heure de cours.


C'est ce qui s'appelle "avoir de la considération'" pour le petit personnel d'Ubu...

vendredi 16 mai 2008

LES RAISONS DE LA COLERE



Point de vue
Lycéens : les raisons de la colère, par Florian Lecoultre (lycéen)
LE MONDE 14.05.08 13h52 • Mis à jour le 14.05.08 13h52

Si les lycéens descendent dans la rue depuis deux mois c'est bien que leur mouvement touche à des enjeux essentiels pour l'avenir du service public d'éducation. Des mobilisations locales, associant enseignants, parents et élèves ont débuté dès la notification aux établissements des dotations horaires avec lesquelles ils sont censés fonctionner lors de l'année scolaire 2008-2009. Au-delà des 11 200 postes en moins à la rentrée 2008, ce sont les 80 000
suppressions prévues pour les trois années à venir, s'ajoutant aux 25 300 postes
supprimés depuis 2003, qui inquiètent la communauté éducative.



En effet, alors que le nombre d'élèves augmente, comment lutter contre l'échec et la reproduction sociale, comment élever le niveau de formation en supprimant les moyens d'un suivi individualisé des élèves ? Sur le terrain, les effets de ces coupes budgétaires massives se font déjà ressentir : les classes dépassent désormais fréquemment les 35 élèves, de nombreuses options sont supprimées, accélérant la ghettoïsation de certains établissements... L'impression domine actuellement d'avoir atteint un point de non-retour dans les lycées.

Les suppressions de postes cristallisent aujourd'hui le mécontentement car elles traduisent une politique à courte vue, tournant le dos à toute véritable ambition éducative. Lors de sa récente intervention télévisée, le président de la République a malheureusement confirmé l'objectif purement comptable des réformes éducatives du gouvernement. La réforme du bac professionnel, conduite sans les lycéens, en est l'exemple type : ne cherchant ni à sortir ces filières de leur image de
relégation, ni à réduire l'échec massif dont les lycéens professionnels sont victimes, elle semble ne poursuivre que l'objectif comptable de supprimer une année de formation.

Les lycéens ne sont pas conservateurs ; au contraire, ils exigent des réformes, mais considèrent qu'elles doivent porter une ambition éducative, répondre à l'objectif d'une école plus juste, permettant l'émancipation des jeunes et l'élévation du niveau de formation de la population. Les moyens doivent ainsi découler des objectifs politiques fixés à l'école, et non constituer un préalable conduisant à revoir les objectifs à la
baisse.

(...)

Le président de la République a raison : si les lycéens se mobilisent c'est parce qu'ils sont inquiets pour leur avenir et qu'ils ont le sentiment d'être une génération
sacrifiée
sur l'autel de la rigueur. Cette situation est loin d'être normale et devrait révolter l'ensemble de la classe politique. Comment en effet
théoriser que par principe la jeunesse soit synonyme d'inquiétude pour l'avenir ? Comment se résoudre à ce que les jeunes Français soient les plus pessimistes d'Europe ? Les lycéens souhaitent au contraire en se mobilisant préserver leur droit à l'avenir et démontrer que la jeunesse doit être le moment de l'émancipation et de l'ouverture des possibles.

Crise des banlieues et mouvement lycéen contre la réforme du bac en 2005, mobilisation contre le CPE en 2006, mouvement des étudiants et lycéens contre la loi sur les libertés et responsabilités des universités en 2007, la fréquence des mobilisations de la jeunesse démontre, loin d'une tradition rituelle, l'ampleur de la crise sociale et générationnelle qui traverse le pays. Le gouvernement serait fort inspiré d'entendre le message de la jeunesse, faute de quoi c'est l'avenir de l'ensemble du pays qui sera compromis.

(...)
Florian Lecoultre, président de l'Union nationale lycéenne
Article paru dans l'édition du 15.05.08.

mardi 29 avril 2008

défouloir

Lundi matin, jour de rentrée : je suis inspecté dans 1/4 d'heure- 170 professeurs - 3 photocopieuses, 2 toujours en panne . La 3ème aussi !
Une irrésistible envie me prend !

jeudi 24 avril 2008

Pourquoi faut-il supprimer des postes de profs ?


Moi naïvement, je pensais que dans le monde d'ubu, le secrétaire d'état à la fonction publique, c'était quelqu'un qui avait envie de défendre le service public, qui croyait au moins un peu en la qualité des gens qui y travaillaient (les fonctionnaires donc). Mais tout ça c'était avant de lire les propos Santinubuesques tenus lors d'une réunion de la Fondation concorde le mercredi 20 octobre et rapportés par Charlie-Hebdo. Ah!!! quel humour ce Santini ...(cliquez sur l'article)

Dans ces propos Santinubuesques il admet que les habitants du monde d'Ubu sont contents de la qualité du service public rendue par les fonctionnaires (ces gens qui coutent trop chers et qui vivent trop vieux...). Pour le coup, ce n'est pas facile d'imposer des réformes...La solution pour résoudre ce problème est de procéder en deux temps :

1 - Faire en sorte que les habitants du monde d'Ubu ne soient plus contents et pour cela il faut fragiliser les services publics de l'intérieur afin d'en dégrader leurs qualités (sous effectif, baisse d'investissement, etc...) .

2 - Une fois que les services publics sont impopulaires, le prétexte est tout trouvé pour passer toutes les réformes possibles et voir, les privatiser...

Les profs, c'est 800 000 fonctionnaires. On supprime un peu plus d'1 poste sur 10 d'ici 2012 (85 000 postes). Les classes à 45 élèves, les profs non remplacés, etc. c'est pas un problème, bien au contraire c'est le but. Quand plus personne ne sera satisfait de l'éducation nationale, enfin on privatisera tranquillement...

mardi 22 avril 2008

Mixité à l'école = appel à la vigilance














Le 9 avril 2008, le Conseil des Grands Sages d'Ubu s'est réuni, comme d'habitude, pour papoter un peu.

Cette fois-ci, il s'agissait de débattre de la mixité à l'école.

Vaste sujet très intéressant, quand on sait combien il est de plus en plus difficile pour de jeunes ados d'aujourd'hui d'accepter la différence.

Le 9 avril 2008, Le gouvernement a lamentablement menti au Conseil des Grands Sages d'Ubu en prétextant une directive provenant de l'Ubunion Européenne:

directive 2002/73/CE du Parlement européen et du Conseil du 23 septembre 2002 modifiant la directive 76/207/CEE du Conseil relative à la mise en oeuvre du principe de l'égalité de traitement entre hommes et femmes en ce qui concerne l'accès à l'emploi, à la formation et à la promotion professionnelle, et les conditions de travail, Journal Officiel. L269 du 5.10.2002, p.15)

pour tenter d'imposer une nouvelle loi qui nous ferait revenir sur le principe de mixité si cher à notre école républicaine.

Petit rappel pour ceux qui n'ont pas assez bûché à l'école et précision pour ceux qui n'ont pas eu la chance d'avoir envie d'y rester:

Directive : n. f. XIXe siècle. Forme féminine substantivée de directif. MILIT. Instruction générale, ordre d'opérations émanant du haut commandement. Prescrire une manœuvre par une directive précise. Par ext., surtout au pluriel. Indications générales données par une autorité à ceux qui sont chargés de les exécuter. Demander, donner, recevoir, transmettre des directives. Suivre les directives. Se conformer aux directives. Enfreindre, transgresser les directives.

Une directive, c'est donc une 'indication' et non une loi contraignante. Quel grossier argument de la part des Ubugouvernants :nous faire croire que la directive doit être immédiatement traduite en loi ! Bons petits soldats qui nous diront bientôt :

Mais, ma pauv'dame, on n'y peut rien: c'est l'Europe. C'est inéluctable, vous le savez bien (comme la mondialisation)

L'Ubunion Européenne, tout comme la mondialisation, est un prétexte très utile pour proscrire toute forme de volontarisme politique ou encore mieux : pour masquer la volonté perverse de nos dirigeants ("c'est pas de notre faute !") Bref, L'Ubunion-Européenne n'a pas encore- mais méfions-nous - les moyens institutionnels d'imposer aux 27 une quelconque loi.

Elle a beau émettre des directives et donc, des indications (c'est tout de même l'Académie Française qui le dit !), pour l'instant ça vaut autant qu'un faux billet de 500 euros.

Enfin, rassurons-nous comme nous le pouvons, le Conseil des Grands Sages d'Ubu a pris les vilains menteurs la main dans le sac : Hu hu hu!

Alors, qu'on discute de la mixité à l'école depuis les IUFM jusque dans des débats à l'Inspection Académique est une chose, mais qu'on laisse "voter" des lois réactionnaires et discriminatoires en est une autre.
Ubuesques mensonges...

lundi 21 avril 2008

Les profs d'Ubu sont des racailles!


On n'en croit pas nos yeux ici à Ubu!
Les profs, qui sont toujours contre tout, pètent complètement les plombs!
Vous vous souvenez de mai 68 en France? Les barricades, tout ça tout ça? Vous voyez les émeutes de 2005 dans la banlieue de la capitale gauloise? Et bien croyez-moi si vous le voulez, mais ce n'est rien face à la rébellion des profs d'Ubu!

Dire que nous laissons nos enfants entre leurs mains 6 jours sur 7 ! Moi, en tant que parent ça me donnerait plutôt envie de les envoyer au lycée voisin d'Ubu, la Boitabac de la tartufferie d'Avesnes (qui fleure bon l'aristo-ouaille...). Au moins là-bas ça tourne rond et les vigiles qui sont à l'entrée savent y faire! (je sais, je les connais, ils travaillaient au Lideure Prix en bas de chez moi avant).


Ces messieurs-dames ne sont pas contents parce que le Ministre de l'éduconsommation a décidé qu'il fallait faire des économies pour pouvoir payer les robes Prada de Mme la présidente et les rolex de leur chef ubuesque. Mais c'est ça, le prix à payer de la monarchie élective !

Toujours est-il que ces gros égoïstes et privilégiés de profs préfèrent se balader deux fois par semaine dans la rue avec des banderoles et en chantant plutôt que de faire cours. En plus de ça c'est qu'ils embarquent nos gamins avec eux! Ah ça! C'est honteux! Si encore ils faisaient des pauses pédagogos au musée du lard...

Déjà qu'ils n'en fichent pas lourd d'habitude mais quand ils font la grève, c'est le pompon ! Il faut enfin qu'il admettent qu'ils sont trop nombreux, quand même : 1 prof pour 57 élèves. Ils demandent quoi, de plus ? Et payé 4000 € par mois en début de carrière, comme le rappelait dernièrement ce cher Santini .
Et bientôt 5000 € grâce aux réformes de notre ubuesque président http://blogs.lexpress.fr/greve/2007/11/lundi_19_novembre_andr_santini.html : faut pas exagérer quand même !
En plus, je ne sais pas ce qu'ils fichent avec nos mômes : ils ne savent même plus écrire Français ni faire une addition. On se demande bien ce qu'ils leur apprennent à longueur de journées.

Des fainéants, ce sont des fainéants ! (Et encore, j'ai l'obligeance de ne pas m'étaler sur leur 3 mois de vacances annuels, éternel poncif, objet de récrimination récurrent de notre part, à nous la France des travailleurs qui se lèvent tôt- mais là, je crois qu'ils ont compris qu'ils ne pourraient pas y échapper et qu'ils allaient devoir bosser pendant leurs vacances, ces gôchistes sectaires : donner des cours de soutien, faire un peu d'administratif, repeindre les classes etc. !)


Il faut vraiment qu'ils comprennent que dans la France d'Ubusarko, les fainéants, c'est plus comme avant : on va les mettre au boulot ! Et quand je dis les fainéants, c'est tous les fainéants : les pauvres, les immigrés, les sans papiers, les R-mistes, les fonctionnaires et mêmes les chômeurs, c'est fini, les vacances !!! Toute cette frange de la population, privilégiée qui parasite l'Etat depuis des années : c'est Terminé ! Ubu roi est arrivé pour nous sauver.



Enfin, soit-dit en passant, c'est quand même agréable de pouvoir se défouler sur eux, de les faire mettre en garde à vue, de pouvoir les insulter en toute impunité, de leur faire enlever leurs punitions par les Ubuproviseurs. C'est grisant, cette chasse aux fonctionnaires organisée et officielle : ils n'en mènent pas large, les cocos. Ce pouvoir qu'on nous donne, à nous les Ubuparents, est impressionnant: on a l'impression qu'à l'école, c'est un peu nous, les maîtres...Enfin, faut pas le dire - On se réjouit entre nous.

Mais revenons aux revendications des profs : il y a encore pire que tout ce que je vous ai dit jusqu'à présent ! Ils sont d'une violence inouie : et ont décidé de passer à la vitesse supérieure en manifestant...en short ! Oui, oui oui!!!
Voyez vous même cette violnece , les images parlent d'elles-mêmes :
En plus, ils écrivent des chansons révolutionnaires, ces rouges : http://sd-1.archive-host.com/membres/playlist/187559659536404595/Profsencolereclean.mp3
Il faut les abattre !

Heureusement, le chef de ce lycée d'Ubu du 77 a pris ses dispositions et tout semble être fait pour que cette vidéo d'incitation à la violence disparaisse du paysage virtuel ! Ouf! Me voilà rassurée. Pas vous?

En bref, les profs, attendez-vous au pire : on est bien décidé à vous mener la vie dure. On a tous des comptes à régler avec l'école et là, , on a enfin un gouvernement qui se fait l'instrument de notre vengeance. Alors, je vous conseille de méditer cette pensée philosophique de Duchemol :
Vous n'arrivez pas bien à lire :
-le chien, pris au piège :
"si tu penses ne jamais avoir de chance"
-le chien, "pris" par le renard :
"sache que cela peut toujours être pire"
A Ciao bonsoir

dimanche 20 avril 2008

Ubuesque réforme de l'enseignement des langues vivantes.


Depuis 2005 et après un long processus de réflexion, coordination et institutionnalisation (Scions, Scions !) l’enseignement des langues vivantes s’est vu transformé par le Conseil de l’Europe du monde d'Ubu et son Cadre Européen Commun de Référence en Langue (ça en jette hein ?)

Explications (Désolée…mais il le faut, n’avez qu’à vous servir un apéro, ça aidera) :

L’Union Européenne d'Ubu, même si elle est dirigée par des ambitions souvent économiques, compte encore quelques intellectuels qui croient, eux, à la communication entre les peuples et à la richesse des échanges.

Le Conseil des grands sages d'Ubu a cherché à mettre en place une réforme pour :
- Uniformiser (beurk !) les examens scolaires.
- Permettre la mobilité des citoyens dans le domaine professionnel
(qu'un citoyen d'Ubu du nord puisse aller bosser dans le sud d'Ubu : c'est bien pratique mais peut être aussi esclavagisant quand il s'agit de le faire travailler aux conditions de son pays d'origine...merci le TCE)
- Favoriser les échanges – humains, économiques, professionnels, intellectuels – entre les Espagnols, les Français, les Allemands, les Italiens…etc.
(Chuuut, faut pas parler des Roumains ! on n'est pas tous égaux à Ubu...il y a des citoyens Ubu de seconde zone qui habitent à Ubu, mais pas trop quand même !) ...Vomitive Union Ubueuropéenne ...
On est quand même 27 pays à faire partie de l’Ubueurope et avec 35 langues officielles parlées dans l’Europe géographique, il fallait bien faire quelque chose de ce côté là !

Et ça sert ! Regardez les mecs de Dacia-Renault : c'est grâce au Français approximatif des ouvriers roumains qu'ils arrivent à organiser de mini-grèves européennes. Tant que l'Ubuyen ne prendra pas le pas sur l'esperanto on ne s'en sortira pas!


En attendant, on ne peut pas leur reprocher d’avoir voulu harmoniser l’enseignement des langues.

Cependant, il ne faut pas en rester là car il y a un véritable fossé entre la théorie (les prescriptions) et la pratique (ce que nous pouvons réellement mettre en place dans nos classes : le réel, quoi !) : c'est bien de pondre des trucs intéressants, même indigestes, mais encore faut-il que les gens du terrain, nous, les profs, puissions les mettre en pratique.

C'est là toute l'absurdité, l'"ubuesquerie" du système éducatif (comme du fonctionnement d'Ubu dans son ensemble) : les règles tombent d'en haut sans que ceux qui les reçoivent sur la figure n'aient été suffisamment préparés ni informés...Bah, le petit personnel d'Ubu a l'habitude...

Principe du Cadre-Européen-machintruc :

Dans le jargon technocrate des profs de langue, on l’appelle CECRL mais nous l’appellerons le plus souvent "Cadre" parce que c’est plus facile.

Comment ça marche ?

Eh bien, dans tous les pays qui appartiennent à l’UE (Union Européenne et pas Ubuesque Europe, je vois venir les mauvais esprits), les petits enfants et les grands qui se mettent à l’anglais ou au roumain tardivement nsont évalués selon un cadre (le fameux "cadre" !)

Trois niveaux :
A = niveau de survie, je peux manger, boire, dormir, mais ce n’est pas dit que je puisse emballer quelqu'un, le p’tit canon à la main, acoudé au bar.

B = niveau intermédiaire, je peux satisfaire tous mes besoins primaires et commencer à avoir une vraie discussion sur l’oreiller à condition de savoir parler avec les mains et d’être super bon à « Dessiner c’est gagner » !

C = niveau expérimenté, je peux lire Kant dans le texte et en VO! Waouuuh : comment je peux trop frimer ! mais j'peux aussi expliquer à ma pote Alison que Londres c'est beau, mais que côté services publics, l'Angleterre, ça craint !


Dans le fond, l'idée est bonne sauf que le cadre est beaucoup trop détaillé et si lourd qu’aucun prof de langue n’a le temps de lire, occupés qu'ils sont tous à remplir leurs tâches quotidiennes (de profs) et à remplir de la paperasse inutile (merci l'administration !)

Toujours est-il que lorsqu’on lit ce pavé en diagonal (le CECRL fait au moins 190 pages) en méditant chaque chapitre tout seul dans son coin, le risque de "déraper" est important. Entendons-nous.

Attention danger : (Oula! Oula! Oulala! chantaient Ludwig Von 88! - pour les fan de punk)

Dans la plupart des bahuts, on a balancé cette réforme, comme toutes les autres, à des profs –jeunes ou vieux, néotit’, vacataires, expérimentés, étrangers, français – sans la moindre explication ni réelle formation. Une journée par-ci, par-là à l'Inspection Académique ou à l'IUFM, entre deux pauses café et la cantine.

Or, ces mêmes profs ont dû, en trop peu de temps, mettre en place de nouvelles épreuves, avec de nouveaux types de documents et surtout une nouvelle philosophie privilégiant l'importance de l'oral et beaucoup de raccourcis ont été pris (c'est ce que signifie "déraper")

C'est la faute à "Pas d’bol" :

Paloma, la prof d’italien est en train d’organiser un échange avec Rome; elle n’a même pas le temps de lire
femme actuelle, alors, l'intégral du Cadre...

Le prof d'allemand, lui , c'est l'intégral de Kant qu'il préfère lire et en effet, c'est plus utile, pour préparer ses Terminales Littéraires à l'approche imminente du bac.

L'autre prof d'italien, Claudia, c'est l'intégral de Gramsci qu'elle n'arrive pas à terminer. De toute façon, elle a abandonné les nouvelles de Dino Buzzati avec ses élèves qui ne comprennent rien et elle se dit que faire des débats sur l'utilité des téléphones portables, ce sera toujours mieux pour rétablir la communication entre elle et eux - communication rompue depuis plusieurs années (depuis qu'ils ne savent plus faire la différence entre un adjectif et un verbe). Des années d'incompréhension mutuelle, ça use : heureusement, le Cadre (qu'elle a compris très vaguement) est là pour la sauver : fini le calvaire des expressions écrites, vive le débat démocratique !

Sue Ellen, la prof d’anglais, elle picole depuis qu’elle a compris qu’elle n’avait définitivement aucune autorité sur ses relous de gamins mais qu’elle persiste à ne pas changer de boulot. Alors, franchement, elle préfère lire les contes d’Andersen en Anglais et aller en Ecosse goûter du bon whisky à chaque vacances de printemps. Le Cadre, version "débat oral" démocratique, ça lui va bien aussi.

Quant à Mercedes, la prof d’espagnol, son trip c’est le flamenco, ses enfants et son mari qu’elle garde à la maison à bon coup de "paëlla maison" (= deux heures de préparation à caler entre les devoirs des gamins et la réunion de l’association
Viva España pour préparer le spectacle de fin d’année), alors pour lire le pavé qu’est le CECRL, on repassera !

Et puis bon, Miskyna, la prof de russe elle galère avec ses 18h de service réparties sur 4 établissements, situés dans un rayon de 60 km autour de son domicile. Elle est crevée et elle a du mal à payer son loyer qu’elle partage avec la prof d’arabe qui bosse dans les mêmes conditions qu’elle. Du coup, toutes les deux, le soir, elles préfèrent corriger leurs copies de collégiens
et de lycéens (car oui…elles ont tous les niveaux) sur le canapé en regardant la nouvelle star parce que ça fait du bien de rire un peu entre copines!

Est-ce la réforme qui est ubuesque ? Pas tant que ça.

Pendant des décennies, nous avons formé des élèves à être capables de décrire le tableau de Guernica dans le détail ou d'expliquer les poèmes de Schiller. Il était peut être temps de penser à les rendre capables de communiquer, à leur apprendre, entre autres, comment demander une chope de bière dans un pub de Galway (et je vous parle même pas du Frenchy accent..."so cute" mais un peu ringard quans même !)I l faut dire que 35 élèves par classe, ça n'aidait pas..

Aujourd'hui la politique des langues étrangères a changé : ne prêtons pas de mauvaises intentions. Disons même que l'idée était louable...
Mais comment expliquer que les profs de langues en sont arrivés, en deux ans d'existence de cette réfome, à délivrer des certifications en langue à des élèves qui parlent mieux avec leurs mains, par des grimaces et des dessins qu'avec des mots?



Pourquoi acceptent-ils d'apposer un 15/20 sur une copie de bac à un élève qui, à une question de compréhension écrite du genre "Comment s'appelle le héros du texte et quelle est sa nationalité?", répond littéralement - dans la langue évaluée - "Marcel nom principal personnage. Lui être françoisais"???!!! (véridique!)
Bien sûr que le prof correcteur devine que l'élève a compris, mais sincèrement, côté communication, il faudrait peut être revoir sa copie...et pas que celle de l'élève en question!
A moins qu'il faille s'extasier devant un élève qui, au bout de 5 années d'étude d'une langue vivante, parvient à aligner dix mots, et tant pis s'ils sont dans le désordre?...

C'est simple, lorsque vous organisez un débat d'une heure avec 20 élèves et qu'il faut noter tout le monde, chacun dans son rôle, on valorise la moindre prise de parole, fût-elle incorrecte grammaticalement. On loue "l'intention", le jeu (comme au théâtre), la valeur des arguments (comme en philosophie)...autant de critères qui ne sont pas pour autant linguistiques.


Un prof d'Ubu a tenté l'expérience : prof de maths, il participé à un débat dans une langue étrangère qu'il avait apprise à l'école il y a plus de 15 ans : deux phrases apprises par coeur (puisque le thème du débat et le rôle sont fixés à l'avance) et le voilà avec un 17...Pas étonnant si ceux qui plafonnent à 7 en Français parviennent à décrocher un 14 en langue.
Que mesure t-on ? Quelles compétences ? Ne faut-il pas que les bases soient assurées avant de pouvoir se livrer au jeu de la conversation ?

Peut-être est-il simplement difficile d'assurer que la "culture classique" (de surcroît, étrangère. Cf. Shakespeare, Don Quichotte, Goethe etc.) soit transmise aujourd'hui à des élèves qui ont du mal à maîtriser leur propre langue (non un "substantif", n'est pas une nouvelle marque de capote...) Il est plus facile de les noter sur leur propres aptitudes : la tchatche ! Ce que les textes officiels d'Ubu nomment très poétiquement "Compétences pragmatiques"!

Alors l'oral, comme partie intégrante de la formation de nos élèves en langue, oui d'accord ? ! A condition que ce ne soit pas l'occasion de casser le baromètre d'une pseudo école "démocratique" où le débat participatif vient remplacer la culture et la parole de l'enseignant et où la communication vient remplacer la maîtrise de la langue...

Ah, "l'ère de la sacro-sainte communication" : on ne parle que de ça ; on note maintenant les èlèves sur leur capacité à communiquer (entre nous, on peut très bien communiquer avec les mains et se faire comprendre...) mais la maîtrise d'une langue, c'est autre chose : les bases nécessaires manqueront pour que l'exercice devienne vraiment ludique et profitable...

Mais comme nous l'avons dit, nous n'en voulons pas au Cadre (qui n'est qu'un cadre, comme son nom l'indique et qui offre une certaine liberté) : nul n'interdit de continuer à intégrer des éléments de culture dans ce nouvel édifice.

Alors, les profs de langue...un peu d'esprit critique ?


ANNEXE : la maîtrise des langues par nos élèves illustrée par deux exemples :