jeudi 27 mai 2010

Dans le lycée de demain, quel rôle pour l’enseignant ? ….ou « vendre ou apprendre il faut choisir ? »

Depuis quelques années, les différentes réformes de l’éducation ont modifié les rapports «profs - élèves - savoir». Alors qu’auparavant ces derniers reposaient sur un dispositif triangulaire, ils ont été modifiés pour passer à un dispositif circulaire où l’élève est placé au centre (Révolution copernicienne de M.Allègre).
Cette évolution peut paraître tout à fait louable. Mais sous prétexte d’intéresser l’élève, qui est devenu un client à satisfaire, les savoirs et les exigences ont peu à peu été mis de côté.
Avec la réforme du lycée, nous atteignons le summum de cette révolution copernicienne. La matière que j’enseigne en seconde fait partie des enseignements d’exploration proposés aux élèves à la rentrée prochaine. En quoi consistent ces enseignements ? Quel est leur but ?

Dans le discours que l’on nous assène, le premier argument est qu’« il faut faire plaisir aux élèves » (si si…) ! Cela signifie la disparition de réelles compétences à atteindre, de savoirs véritables à transmettre et évidemment d'évaluations (qui incarnent la fameuse « pédagogie par l’échec » tant conspué par nos pédagogues) !!! Ce qu'il faut, c'est que les élèves « s'éclatent » pendant nos cours, qu'ils s'amusent, qu’ils soient contents d’être avec des animateurs sympas (type colonies de vacances ?)…Il faut leur donner envie de continuer dans nos filières en première.

En un mot, il faut vendre nos formations. A nous d’être de bons vendeurs aujourd’hui pour avoir du travail demain. Nous serons en effet tenus pour responsables de l’absence de candidats dans nos filières …La loi du marché a pénétré un nouveau secteur : celui de nos lycées. Cette politique permet une mise en concurrence des lycées mais également des profs entre eux (diviser pour mieux régner).

Notre métier évolue. Désormais, nous passons du statut de profs à celui d’ animateur ou de vendeur…Vendre ou apprendre, il nous faudra choisir…Ceux qui réussiront le mieux ne seront pas forcément les plus glorieux…

vendredi 9 avril 2010

Le rectorat recrute ses profs !à l'ANPE !!

Un con, ça ose tout : c'est même à ça qu'on le reconnaît !
Audiard







mercredi 7 avril 2010

Le gouvernement fait sa pub !

Est-il légitime qu’un gouvernement investisse des millions d'euros pour faire le service après-vente de ses réformes ?

Les suppressions de postes dans l’Education Nationale se poursuivent. Le gouvernement Sarkozy a en effet prévu de dégraisser le mammouth de 80000 enseignants à l’horizon 2012 alors que la violence en milieu scolaire explose, comme le rappelle la convocation d’Etats généraux sur la question (7 et 8 avril), notamment en raison de la diminution de la prise en charge des enfants et des adolescents par des adultes formés et compétents. Mais peu importe ! La logique gestionnaire doit l’emporter sur tout projet de société ! Comme l’avait indiqué Philippe Seguin dans son rapport de la Cour des comptes, il s’agit là de petites vue comptables court termistes.

.

Par ailleurs, une réforme des lycées est en cours qui doit prendre effet à la rentrée prochaine en classe de seconde. Apparemment, il n’y a pas de lien entre ces deux faits, le seul but de cette réforme étant bien sûr d’améliorer l’enseignement en lycée. C’est oublier encore une fois que les considérations comptables l’emportent largement sur les considérations pédagogiques, cette réforme n’ayant d’autre but que de charger un peu plus les classes pour diminuer le nombre d’enseignants, le tout masqué sous un vernis de buts louables. Le but non avoué du gouvernement sera donc de déguiser cette logique aux yeux de tous. Comment ?! Par un procédé vieux comme le monde : la propagande…

S’il y a en effet un domaine dans lequel le gouvernement ne fait pas d’économies, c’est celui de la communication. Personne n’a pu , par exemple, échapper au matraquage publicitaire sur le pouvoir d’achat dont la campagne a été conçue par l'agence Young & Rubicam pour un budget mirobolant de 4,33 millions d'euros. En période de crise et de rationnement pour « tous » et en particulier pour les services publics, cela mérite d’être noté…

Mais surtout, sous prétexte d’informer les jeunes sur les nouveaux programmes du lycée, le gouvernement fait sa pub sur internet et sur les radios de jeunes (Virgin radio, NRJ,…).

http://www.education.gouv.fr/nouveau-lycee/documents.php

Il y a une grande différence entre information et publicité ! Dans notre cas, il s’agit bel et bien de pub et plus exactement de propagande du gouvernement, le but de cette campagne étant de persuader les jeunes (et leurs parents) que ces réformes apporteront un « plus » à leur éducation afin qu’ils y souscrivent.

Prenons l’exemple du spot publicitaire radio sur l’accompagnement personnalisé (thème on ne peut plus vendeur qui consiste à culpabiliser les profs en réconfortant les parents). Le scénario du spot, en gros, est le suivant :

  • Jeune : c’est quoi le cosinus de 60°, trop duuur toutes ces formules, c’est pas gagné ce contrôle…
  • Adulte : Excusez moi, c’est pour le nouveaux lycée, vous allez entrer en seconde ?
  • Jeune : oui.
  • Adulte : Et ça vous dirait d’être accompagné dans votre scolarité ? *
  • Jeune : ce serait pas mal oui !
  • Adulte : ce sera le cas, car des la rentrée 2010 chaque élève de seconde pourra bénéficier d’un accompagnement personnalisé de 2h par semaine…
  • Jeune : Ah ! je sais, cosinus 60° c’est ½…
  • Etc.

*ce qui suggère, implicitement, que les enseignants n’accompagnaient pas leurs élèves auparavant…et occulte le problème crucial du manque de travail personnel fourni par les élèves en temps normal, thème qui n’est jamais évoqué…Mais enfin, que font les enseignants ??!!

A l’écoute de ce spot publicitaire, on comprend qu’un professeur passera 2h par semaine avec chaque élève (voire un petit groupe d’élèves) pour lui venir en aide sur tous les points où il rencontra des difficultés. Comme par hasard, dans le spot, il s’agit d’un cours de soutien en maths : C’est porteur les maths en communication…

La vérité est tout autre :

  • Il est bien prévu 2h par semaine d’accompagnement personnalisé en classe de seconde (puis en première et terminale), mais celles-ci seront réalisées en classe entière (35 élèves) ce qui fait environ un temps de 3 minutes par élève…
  • Ce ne sont pas des heures prévues pour du soutien (même en maths..). En fait, Il n’y a pas de programme défini. Ce sont les enseignants qui doivent définir un projet d’utilisation de ces deux heures hebdomadaires en fonction des besoins de chaque élève (soit des 35 élèves). Beau projet, sacré casse tête.

Il en va de même pour la qualité des différentes informations disponibles sur le site du gouvernement. Une information incomplète et orientée. Bref, de la propagande !

Comment ne pas s’indigner d’un tel matraquage médiatique de la part d’un gouvernement dans le but de soutenir ses réformes…A l’heure où chacun est sommé de faire des efforts et de participer à l’effort collectif, on attendrait davantage de justice et de transparence de la part de notre pouvoir politique …



jeudi 18 mars 2010

Le pédagogo Mérieu contre l'école

Bonjour à tous,

nous reprenons nos activités, après un an d'absence, puisqu'on a eu l'amabilité de nous faire de la pub et que cela nous a revigorés. Merci donc à Marianne, journal républicain de gauche, d'avoir publié cet article avec lequel nous sommes en tous points d'accord.

Nous revenons avec un nouveau slogan emprunté à J.F. Kennedy,

"chers parents, ne vous demandez pas ce que peut faire l'école pour vous (et vos enfants), demandez-vous plutôt ce que vous pouvez faire pour elle (et par conséquent pour vos enfants !"

La société a besoin de reprendre en main la charge éducative au lieu de la confier exclusivement à l'école sans (en plus !) lui donner les moyens de l'exercer...

http://www.marianne2.fr/Philippe-Meirieu-envoie-l-Ecole-au-compost_a189676.html

Philippe Meirieu envoie l'Ecole au compost
Anne Frémaux - Mariannaute Dimanche 7 Mars 2010 à 13:01 Lu 18019 fois
Texte inspiré d'un article de Paul Ariès paru dans le journal La décroissance

Philippe Meirieu, ex-directeur de l'IUFM de Lyon et grand défenseur des thèses pédagogistes, est tête de liste Europe Ecologie pour les Régionales en Rhône-Alpes. Mais des militants de gauche attachés à l'Ecole républicaine, comme Anne Frémaux, professeur de philosophie, ne pourront voter pour lui.

Je suis enseignante depuis 8 ans, professeur de philosophie. J'ai eu l'occasion, notamment au cours de l'élaboration de mon mémoire de titularisation, de rencontrer les écrits de Philippe Meirieu, lui-même philosophe de formation, et de prendre connaissance du combat qui l'a opposé, au sujet de l'éducation, à ceux qu'on appelle les « républicains » (pédagogistes versus républicains).

Or, M. Meirieu, ex-directeur de l'IUFM de Lyon, professeur de « sciences de l'éducation » a été désigné comme tête de liste d'Europe Ecologie en Rhône -Alpes, à l'initiative des frères Cohn Bendit (qui, peu regardants, ont même été jusqu'à exhumer, en Alsace, Antoine Waechter un vieil écolo de droite, que Mitterrand avait fait monter dans les années 90 pour contenir le mouvement écologiste sur sa gauche...).

Macdonaldisation de la pensée
Philippe Meirieu peut être considéré comme l'introducteur, en France, des nouvelles pédagogies importées des Etats-Unis et dont la dangerosité a déjà été analysée par Hannah Arendt dans les années 60 (voir à ce sujet La crise de la culture).

L'idée est la suivante : pour faire face à la massification de l'enseignement, il faut une «massification » de la culture. Les enfants des milieux populaires n'étant pas jugés aptes à bénéficier d'une culture traditionnelle, « classique » (qui sera donc dédiée aux élites), il faut leur réserver un apprentissage adapté à leur milieu social et à leur niveau. P. Meirieu eut à ce sujet cette phrase édifiante qu'il dit ensuite avoir regrettée : « les enfants des classes populaires peuvent très bien apprendre le Français dans des notices d'utilisation » .

Véritable Macdonaldisation de la pensée, cette idéologie a été accompagnée d'un changement de vocabulaire dont la dangerosité n'a d'égal que son imbécillité : ainsi un élève n'est plus un «élève » mais un « apprenant » (dimension active censée masquer la réelle inertie du dit-élève), un ballon n'est plus un ballon mais un « référentiel bondissant », un « stylo» est devenu un « outil scripteur », autant de mots savants censés donner une légitimité scientifique à des experts ès éducation (sciences de l'éducation) qui n'ont jamais vu un « apprenant » de leur vie.

Le savoir sacrifié
L'apprenant, grâce à P. Meirieu, grand fondateur des IUFM, proche de Allègre et de Jospin (cf. la loi d'orientation de 1989) est placé « au centre du système éducatif », prenant la place du savoir et de la culture (moyen, au passage, de culpabiliser les enseignants qui, jusque là, il est vrai, n'avaient pas considérer leurs élèves comme destinataires de leur savoir, n'est-ce pas ?!!)

L'école n'est donc plus un lieu de « transmission du savoir » (le savoir étant considéré comme rébarbatif comme tout ce qui a trait à la contrainte éducative) mais un « lieu de vie » où nos jeunes sont censés s'épanouir de façon ludique - d'où les recommandations faites aux jeunes enseignants dans les IUFM de ne plus les corriger en rouge et de ne plus évoquer devant eux ce mot tabou qu'est le « travail ».

Il s'agit de laisser croire que tout peut s'obtenir sans effort, de façon agréable, que tout peut être consommé. C'est à l’enfant, dès lors, qu'il appartiendra, quasiment par ses propres moyens (puisque le prof n'est plus doué d'autorité pédagogique), de redécouvrir le savoir accumulé au fil des siècles...Vaste fumisterie...

Exit donc l'effort, la discipline, les estrades, le par cœur, les classiques, les cours magistraux...Bienvenue le ludique, les romans de gare étudiés en classe, la disposition de classe en U pour faire plus « cool », l'interactivité (c'est-à-dire les cours transformés en café du commerce...) et les TIC (technologies de l'information et de la communication : vaste programme présenté comme un sésame qui consiste à mettre les élèves devant des ordinateurs ou des films au lieu de faire cours...)...

L'ascenseur social en panne
Un cours réussi est un cours où l'enseignant parlera le moins possible, qu'on se le dise ! Le prof est conçu comme l'"animateur" (terme qui figure dans les textes officiels) d'un grand foutoir organisé destiné à satisfaire l'envie de plaisir et de jouissance des élèves (qui, en théorie, sont « naturellement » disposés à s'enrichir intellectuellement...Sorte de théorie du «bon sauvage » appliqué aux enfants).

Et pour couronner le tout, on laissera aux parents le soin de décider des passages dans les classes supérieures et on s'efforcera de supprimer toute forme d'autorité et de sanction, dans les établissement scolaire de seconde zone afin que la diffusion du savoir y soit rendu impossible (les établissement d'élite ayant, bien entendu, des régimes particuliers : on continue à y enseigner le grec, le latin, l'allemand, et bientôt l'histoire...autant de matières abrogées dans les autres).

Le hic, bien sûr, c'est que le savoir est toujours nécessaire pour accéder aux postes à responsabilité et son acquisition n'étant plus permis par l'école, seuls ceux qui, socialement, en disposent chez eux, peuvent espérer y parvenir. Les classes moyennes les plus modestes sont donc les premières victimes de ce déclassement organisé (les classes populaires n’y ayant jamais eu vraiment accès, sauf de façon marginale). D’où le sentiment de malaise et la peur grandissantes que ressentent ces foyers au sujet de l‘avenir de leurs enfants.

On pourra ensuite, toujours s'étonner que l'ascenseur social ne fonctionne plus et vouloir, pour y remédier, obliger les grandes écoles à diminuer le niveau de leur concours pour une minorité, au nom de la discrimination positive (véritable oxymore).

Elever le niveau
On remarquera qu'il s'agit là de prendre le problème à l'envers. Que diriez-vous, plutôt, d'élever le niveau des classes populaires à celui des classes bourgeoises grâce à un enseignement de qualité que sont parfaitement capables de dispenser les profs de notre pays (très bien formés jusqu'à présent !!!...)

Mais bientôt, le niveau des profs (suppression des concours et réforme des méthodes de recrutement) sera aligné sur celui des élèves, ce qui supprimera toute velléité de dissidence encore trop prononcée chez des profs trop bien formés et donc mécontents de l’écart qu’ils voient se creuser entre ce qu’ils pourraient faire et ce qu’on leur demande de faire : la droite libérale ne fait qu’achever le programme socialiste mis en œuvre via Allègre et Meirieu depuis 1989.

La méthode promue par Meirieu a tout simplement rendu tout enseignement impossible dans les nombreux établissements où elle été mise en application : selon la formule de Liliane Lurçat (Vers une école totalitaire ? Guibert, 1998), le pédagogisme est une méthode anti-intellectuelle qui organise la destruction des intelligences et qui accuse d'élitisme toute forme de transmission de savoir.

L'élitisme pour tous
Pour ma part, je remercie l'école « élitiste » d'avoir permis à ma mère, sortie de l'école à 13 ans, de maîtriser parfaitement sa langue maternelle et d'avoir pu, grâce à cela, exercer avec dignité le métier de secrétaire que beaucoup de nos bac + 2 actuels seraient incapables de faire ,en raison de leurs "faiblesses" (euphémisme) syntaxiques et orthographiques.

Je remercie, pour ma part, mon institutrice de campagne d'avoir eu une conception « élitiste» de l'enseignement ainsi que tous mes enseignants de collège et de lycée de banlieue populaire car ils m’ont ainsi permis d'accéder aux plaisirs de l'apprentissage et de la culture. Avec un Philippe Meirieu aux commandes, je n'aurais certainement pas eu cette chance...

Soyons clairs : l'idéologie pédagogique de P. Meirieux est en grande partie responsable des dysfonctionnements et de la violence que nous rencontrons aujourd'hui à l'école. Pour ceux qui ne sont pas convaincus de la nocivité des méthodes pédagogistes, je conseille le visionnage du film, malheureusement trop peu diffusé, « La journée de la jupe » (avec I. Adjani), dans lequel on peut dire que Meirieu est le principal mis en cause.

Quoiqu’il en soit, pour moi qui suis une républicaine de gauche, fervente partisane de services publics de qualité dont l’école est l’un des emblèmes, ce candidat ne saurait être le mien...

Propos inspiré d'un article de Paul Ariès, journaliste dans le mensuel la décroissance

Pour aller plus loin
Qui a eu cette folle idée de casser l'école de Fanny Capel, éditions Ramsay (2004)
La Fabrique du crétin, La Mort programmée de l’école de Jean-Paul Brighelli, éditions Gawsewitch, 2005
L'enseignement de l'ignorance, de J.-C. Michéa éditions Climats (2006)